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Agence Ecofin
Aujourd'hui Dernière mise à jour le Jeudi 16 Octobre 2025 à 09:41

Prévue en novembre 2025, l’opération est destinée à capter l’épargne nationale, combler un déficit budgétaire à deux chiffres et amorcer le développement de la finance islamique locale.

L’Algérie s’apprête à émettre pour la première fois de son histoire des sukuk souverains, d’un montant de 297 milliards de dinars (2,3 milliards de dollars), afin de financer son déficit budgétaire croissant et de diversifier ses sources de financement.

Selon un document du ministère des Finances, l’émission sera ouverte à partir du 2 novembre 2025 et s’étalera sur deux mois. Les certificats islamiques auront une maturité de sept ans et offriront un rendement annuel fixe de 6%, versé sous forme de loyers aux porteurs, conformément aux principes de la finance islamique.

Une opération destinée exclusivement aux Algériens

La souscription sera réservée aux Algériens résidant dans le pays ou à l’étranger, les investisseurs étrangers étant exclus de cette opération inaugurale. L’émission sera adossée à des actifs immobiliers publics, utilisés comme base de garantie, conformément au fonctionnement des sukuk.

Le gouvernement espère ainsi capter une partie importante de l’épargne nationale, notamment celle qui circule encore dans le secteur informel, estimée par les autorités à près de 10 000 milliards de dinars.

Diversification financière et réformes

Cette première émission de sukuk marque une étape importante dans les réformes économiques menées par Alger, qui cherche à réduire sa dépendance aux recettes pétrolières et gazières, encore dominantes dans les finances publiques. L’objectif est d’élargir la base des investisseurs, de développer le marché domestique des capitaux et de donner une place croissante à la finance islamique dans l’architecture financière nationale.

Le recours aux sukuk doit également contribuer à rapatrier dans les circuits officiels une partie des fonds jusque-là investis dans l’économie parallèle. Le président Abdelmadjid Tebboune avait récemment insisté sur la nécessité de canaliser ces ressources pour soutenir la croissance et financer les besoins sociaux.

Un marché en plein essor

Dans la région, plusieurs pays ont déjà eu recours aux sukuk souverains pour diversifier leurs financements, notamment l’Arabie saoudite, le Maroc ou encore l’Egypte. A l’échelle mondiale, le marché des sukuk représente plus de 800 milliards de dollars d’encours, dominé par les pays du Golfe et la Malaisie.

Une économie sous contrainte

L’opération intervient dans un contexte budgétaire tendu. Après avoir affiché un déficit de 13,9 % du PIB en 2024, alimenté par la baisse des revenus pétroliers et l’augmentation des dépenses publiques, Alger devrait encore enregistrer un déficit supérieur à 11 % du PIB en 2025, selon le Fonds monétaire international (FMI). Le fonds de régulation des recettes (FRR), qui servait de coussin budgétaire, a été totalement épuisé en 2024.

Dans son rapport publié fin août, le FMI souligne que l’économie algérienne a bénéficié d’une reprise post-pandémie, mais reste « vulnérable à sa dépendance aux hydrocarbures ». La croissance, de 3,6 % en 2024, devrait atteindre 3,4 % en 2025 grâce à un léger rebond du secteur énergétique. Mais le déficit courant, revenu en territoire négatif en 2024, devrait se creuser encore cette année, tandis que la dette publique, estimée à 48,5 % du PIB en 2024, pourrait dépasser 60 % en 2026. 

Le FMI plaide pour un ajustement rapide

L’institution internationale juge la situation budgétaire préoccupante et appelle Alger à engager une consolidation « ambitieuse », de l’ordre de 5 % du PIB d’ici 2028, afin de stabiliser la trajectoire de la dette. Le FMI recommande notamment une rationalisation des subventions énergétiques, qui représentent un poids considérable pour les finances publiques, et une mobilisation soutenue des recettes fiscales hors hydrocarbures, aujourd’hui limitées à environ 10 % du PIB.

En attendant ces réformes structurelles, le recours à des instruments de financement alternatifs, tels que les sukuk, apparaît comme une étape nécessaire pour soulager la pression sur le secteur bancaire domestique et diversifier les sources de ressources publiques.

Pour Alger, cette première opération est un test grandeur nature. Si elle rencontre l’adhésion des investisseurs nationaux, elle pourrait ouvrir la voie à de nouvelles émissions, y compris sur les marchés internationaux. Les autorités n’excluent pas, à terme, de proposer des sukuk libellés en devises étrangères afin d’attirer des capitaux extérieurs. Mais, c’est aussi une manière de donner un coup d’accélérateur à la finance islamique, encore embryonnaire dans le pays.

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