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#Demographie #Economie #Emploi #Travail #JORDANIE
Denys Bédarride
Aujourd'hui Dernière mise à jour le Samedi 8 Novembre 2025 à 06:55

Au cœur d’une situation régionale dégradée, la Jordanie fait face à des vulnérabilités internes, à l’image d’un marché du travail sous tension et marqué par les inégalités. Si le taux de chômage des Jordaniens suit depuis 2021 une courbe décroissante (-11%), il demeure élevé (21,3% au T1 2025) et touche inégalement la population, majoritairement les femmes (31,2%) et les jeunes (45,2%). Avec un taux de 9,7%, le chômage des non-Jordaniens – 40% des actifs – est en revanche maîtrisé, induisant à la baisse celui de la population totale (16,6% au T1 2025).

La croissance, atone depuis plusieurs années (+2% par an environ), ne favorise pas la création d’emplois. 

Portée par les investissements étrangers et de grands projets, elle génère essentiellement une demande en capital plutôt qu’en main-d’œuvre. Le faible dynamisme du marché résulte par ailleurs du décalage entre l’offre et la demande : plus qu’un manque d’emplois, il existe surtout un déficit d’offres adaptées aux compétences de la main-d’œuvre disponible. Paradoxalement, le chômage touche surtout les personnes titulaires d’un diplôme égal ou supérieur à une licence, avec un taux de 25,1% au T1 2025

De surcroît, la segmentation du travail et l’importante imperméabilité entre les secteurs empêchent une allocation optimale du capital humain. 

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Cette segmentation repose sur la nationalité, le genre, le secteur ou encore le statut juridique. Par exemple, le secteur privé est traditionnellement occupé par les Jordaniens d’origine palestinienne, tandis que les Transjordaniens – jordaniens d’origine tribale et bédouine de l’est du Jourdain – occupent les postes du secteur public. Mais la capacité d’absorption de ce dernier est limitée par des contraintes budgétaires, incitant les acteurs à se tourner vers le privé, intensifiant ainsi la concurrence. 

Le secteur informel est toujours attractif, notamment chez les non-Jordaniens (78% des salariés), malgré la revalorisation des salaires en janvier 2025. 

Les implications économiques et fiscales de la croissance de l’informel (45% des salariés) posent également des défis, car les travailleurs concernés contribuent peu ou pas aux prélèvement fiscaux et sociaux, bénéficiant toutefois des services publics subventionnés (électricité, eau, gaz et produits de première nécessité). Des réformes comme la simplification des procédures de délivrance de permis de travail, ou encore la réduction des cotisations sociales pour les entreprises doivent à cet égard participer à renforcer le secteur formel.

La source des tensions est également démographique. 

Alors qu’un quart de la population est âgée de moins de 14 ans, les prévisions tablent sur une population de 16,8 M d’habitants d’ici 2040 (contre 11,9 M aujourd’hui). Certes, le changement de régime en Syrie conduit à un retour des réfugiés, mais il sera progressif et, alors que les craintes s’intensifient dans le Royaume sur la situation en Cisjordanie, le marché du travail ne semble pas à ce jour en mesure d’absorber un nouveau choc migratoire. 

Les autorités se doivent donc d’accélérer les réformes structurelles afin notamment d’améliorer l’environnement des affaires.

Source Ambassade de France en Jordanie 

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