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journaliste
vendredi 11 avril 2025 Dernière mise à jour le Vendredi 11 Avril 2025 à 06:21

Le Liban traverse une période critique où les difficultés économiques, logistiques et financières s’entremêlent, mettant en péril la stabilité du pays. Entre la baisse des importations, les risques croissants pour la sécurité alimentaire et les contraintes liées à la liste grise du GAFI, la situation devient chaque jour plus précaire.

Baisse des importations et flambée des coûts logistiques

Les données récentes indiquent une chute de 12 % des importations au premier trimestre 2025 par rapport à l’année précédente. Cette tendance s’explique en partie par les perturbations des routes maritimes, notamment en mer Rouge où les attaques des Houthis ont entraîné une hausse significative des coûts de fret. Le détroit d’Ormuz, zone stratégique pour les échanges, reste également sous tension, alourdissant les dépenses pour les importateurs libanais.

Le port de Beyrouth, principale porte d’entrée des marchandises, ne fonctionne plus qu’à 72 % de sa capacité, en raison de retards administratifs et d’un manque de moyens. Les importations de produits pharmaceutiques, de denrées alimentaires et de pièces détachées – dont le Liban dépend à 80 % – sont particulièrement touchées, faisant craindre des pénuries dans les mois à venir.

Sécurité alimentaire : une vulnérabilité accrue

Le blé, élément central de l’alimentation libanaise, illustre cette fragilité. 85 % des importations proviennent d’Ukraine et de Russie, deux pays dont les exportations sont perturbées par la guerre. La destruction partielle des infrastructures portuaires ukrainiennes et les sanctions affectant les livraisons russes rendent les approvisionnements incertains.

Face à cette dépendance, le Liban tente de se tourner vers d’autres fournisseurs, comme l’Australie ou le Canada, mais ces solutions alternatives entraînent des coûts supplémentaires et des délais prolongés, difficiles à absorber pour une économie déjà exsangue.

Liste grise du GAFI : un frein aux transactions internationales

L’inscription du Liban sur la liste grise du GAFI en octobre 2024, en raison de lacunes dans la lutte contre le blanchiment d’argent, complique davantage les échanges commerciaux. Les banques internationales, soumises à des contrôles renforcés, hésitent à traiter avec des institutions libanaises, rendant l’obtention de lettres de crédit – indispensables pour les importations – plus difficile et plus coûteuse.

Malgré un délai accordé jusqu’en 2026 pour mettre en place les réformes nécessaires, l’instabilité politique et les récentes tensions régionales ont ralenti les progrès, décourageant les investisseurs étrangers et alourdissant les charges financières des entreprises locales.

Un système bancaire en crise et des agences exclusives sous pression

La paralysie du secteur bancaire, héritée de l’effondrement financier de 2019, aggrave la situation. Les banques, en manque de liquidités en devises, peinent à honorer les demandes de lettres de crédit, obligeant les importateurs à recourir à des circuits informels, plus risqués et plus onéreux.

Par ailleurs, le modèle des agences exclusives, qui contrôlent une grande partie des importations, montre ses limites. Ces monopoles, souvent issus de réseaux clientélistes, maintiennent des prix élevés et réduisent la flexibilité du marché face aux chocs externes. Avec la hausse des coûts logistiques et les restrictions bancaires, ces structures pourraient bientôt atteindre leurs limites, entraînant des ruptures d’approvisionnement et une inflation encore plus forte.

Vers une crise humanitaire ?

La conjugaison de ces facteurs – baisse des importations, dépendance alimentaire, contraintes financières et inefficacité des infrastructures – place le Liban dans une situation extrêmement fragile.

Sans réformes structurelles rapides, notamment une modernisation des douanes, une diversification des sources d’approvisionnement et un assainissement du système bancaire, le pays risque de sombrer dans une crise encore plus profonde, avec des conséquences dramatiques pour une population déjà durement éprouvée.

La question n’est plus de savoir si le Liban peut éviter la crise, mais comment il pourra en limiter les dégâts.

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