L’Algérie produit plus de 99% de son électricité à partir du gaz et vise 30% de renouvelables d’ici 2035. Des projets solaires, éoliens et d’hydrogène vert sont en cours dans 46 wilayas pour renforcer la sécurité énergétique et diversifier les exportations.
Depuis plus d’une décennie, l’Algérie affiche une volonté politique constante de développer les énergies renouvelables. Dès 2011, un premier programme national avait été adopté, visant l’installation de 22 000 MW de capacités renouvelables à l’horizon 2030, dont 12 000 MW pour le marché intérieur et 10 000 MW destinés à l’export.
Ces objectifs ont été réitérés à travers le programme « Tafouk 1 » lancé en 2020, qui prévoit à lui seul l’ajout de 4000 MW de solaire photovoltaïque dans un premier temps. En 2023 puis en 2024, les autorités ont confirmé la poursuite de ces ambitions, évoquant désormais un volume total de 15 000 à 22 000 MW d’énergies renouvelables à installer d’ici 2030 à 2035. La stratégie repose principalement sur le solaire photovoltaïque, ressource abondante sur le territoire national, notamment dans les régions sahariennes.
Pour accompagner ce plan, l’Algérie a mis en place en 2021 une structure dédiée, la Société algérienne des énergies renouvelables (SHAEMS), chargée de piloter les projets et d’attirer des partenaires techniques et financiers.
Un niveau de réalisation encore en deçà des objectifs

Malgré ce cadre stratégique, les réalisations concrètes restent, à ce jour, très en deçà des objectifs. Selon les données compilées par le ministère de la Transition énergétique, la capacité totale installée en énergies renouvelables atteignait environ 686 MW à la fin de l’année 2023.
Ce total se répartit entre 448 MW de solaire photovoltaïque, 228 MW d’hydroélectricité et 10 MW d’éolien. A titre de comparaison, la capacité totale de production électrique du pays dépasse les 23 000 MW, majoritairement assurée par des centrales fonctionnant au gaz naturel.
Alors qu’à ce jour, la part des énergies renouvelables dans le mix électrique national reste inférieure à 1%, selon les chiffres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande en électricité continue de croître. Le 23 juillet 2025, la Sonelgaz a annoncé avoir enregistré un nouveau record historique de consommation électrique, avec un pic dépassant 20 000 MW, un niveau jamais atteint auparavant.
Plusieurs projets ont pourtant été annoncés ces dernières années. En 2022, un premier appel d’offres pour la réalisation de centrales solaires totalisant 1000 MW a été lancé dans le cadre du programme Tafouk 1. En 2023 et 2024, de nouveaux appels d’offres ont été publiés, incluant des projets portés en partenariat avec des entreprises étrangères, notamment chinoises. Des accords-cadres ont également été signés pour la construction de centrales solaires de grande capacité dans les wilayas du Sud.
En cumulé, ces projets représentent environ 3000 MW en cours de développement. Toutefois, la plupart sont encore à l’étape de finalisation contractuelle, d’études techniques ou de travaux initiaux, et aucune centrale d’envergure n’est entrée en service dans le cadre de ce programme à ce jour.
Des ambitions maintenues, un écart persistant
L’Algérie ne manque ni de ressources solaires ni d’intention politique affichée. Selon le Centre de développement des énergies renouvelables (CDER), la majeure partie du territoire national reçoit un ensoleillement moyen supérieur à 2500 kWh/m²/an.
Les documents stratégiques publiés jusqu’en 2024, notamment les orientations issues des Conseils des ministres et des communiqués officiels, considèrent toujours les énergies renouvelables comme un pilier de la transition énergétique algérienne. Ils soulignent la volonté de diversification du mix énergétique et la réduction des impacts environnementaux.
Cependant, l’écart entre les intentions et les réalisations concrètes demeure important. A moins de cinq ans de l’échéance fixée pour les 15 GW à installer, moins de 5% de cet objectif a été atteint fin 2023.
D’après le think tank Transnational Institute (TNI), plusieurs facteurs freinent le déploiement des énergies renouvelables en Algérie, notamment la complexité des procédures administratives, l’absence de coordination dans la planification, la capacité limitée du réseau à accueillir les productions décentralisées, ainsi que des retards dans la mobilisation des financements et la conclusion des contrats.
Le cadre juridique et les plans d’expansion sont en place, mais les incitations économiques et réglementaires restent limitées. Dans une étude de la Friedrich-Ebert-Stiftung publiée en mai 2021, le gouvernement est invité à mobiliser les leviers nécessaires en termes de planification intégrée, de gouvernance multi-niveaux, d’attractivité des investissements pour traduire les annonces en capacités effectives.
La même étude souligne que les changements structurels liés à la décarbonation mondiale, avec la baisse anticipée de la demande en combustibles fossiles, constituent désormais un facteur déterminant du rééquilibrage du mix énergétique algérien.
L’atteinte des objectifs de l’Algérie en matière de renouvelable passe par l’opérationnalisation des projets en cours, la structuration d’une filière industrielle locale, et l’intégration des infrastructures dans une planification alignée sur les évolutions des marchés mondiaux de l’énergie.
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