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#Conflit #Tourisme #ISRAEL #JORDANIE
Denys Bédarride
samedi 23 décembre 2023 Dernière mise à jour le Samedi 23 Décembre 2023 à 08:27

Les fragilités macroéconomiques de la Jordanie pourraient être exacerbées par le conflit et des risques potentiels pèsent sur les chaînes d’approvisionnement et sur le secteur énergétique.

Le ralentissement du tourisme pourrait à nouveau peser sur la balance des paiements. Le FMI prévoyait pour 2023 et 2024 une nette amélioration du déficit courant soutenue par des recettes touristiques favorables. Le secteur avait d’ores et déjà enregistré de très bonnes performances sur les huit premiers mois de 2023 : les recettes touristiques ont atteint 5,2 Mds USD, soit 83,4 % de la prévision annuelle du FMI. Or, on observe depuis le 7 octobre des annulations de réservations dans les hôtels – au moins 60 % des réservations ont été annulées en novembre selon l’association de l’hôtellerie. 

Le conflit pourrait également détériorer l’appréciation du risque pays, alors que la Jordanie est extrêmement dépendante des flux de financement externes. Le Royaume peine déjà à attirer suffisamment d’investissements étrangers pour stimuler la croissance et son développement. Si le fort soutien des bailleurs bilatéraux et multilatéraux n’est pas remis en cause pour le moment, la crise pourrait conduire à un renchérissement des conditions de financement.

Des risques potentiels pèsent sur les chaînes d’approvisionnement et le secteur énergétique. 

Alors que la Jordanie importe 95 % de ses produits de base, des inquiétudes pèsent sur les chaines d’approvisionnement, en raison d’incidents sécuritaires dans le Golfe d’Aqaba et des difficultés d’accès au port israélien de Haïfa – autre port utilisé par la Jordanie pour ses échanges avec l’Europe notamment. Le coût du fret n’aurait toutefois pas augmenté à ce stade. Par ailleurs, la Jordanie est particulièrement dépendante de ses voisins en termes d’hydrocarbures : produits pétroliers (d’Arabie Saoudite et d’Irak) et gaz (d’Israël). 

Si quelques perturbations ont été observées sur l’importation de pétrole brut en provenance d’Irak (qui couvrent environ 7 % des besoins pétroliers de la Jordanie et avec une décote de 16 USD par baril par rapport aux prix du Brent), le gaz – permettant de produire 68 % de l’électricité – continue d’arriver en Jordanie. Selon la revue MEES, les livraisons de gaz du gisement Leviathan au troisième trimestre de 2023 ont atteint un niveau record de 334 M CFD et restent stables depuis le 7 octobre. 

Néanmoins, la pression de l’opinion publique jordanienne sur l’accord gazier, plus globalement sur les accords qui lient la Jordanie à Israël, provoque des discussions à haut niveau sur la diversification de l’approvisionnement énergétique. La Jordanie a également confirmé que l’accord eau-électricité avec Israël et les Émirats Arabes Unis, fortement encouragé par les Etats-Unis, était reporté sine die (le deuxième MoU ne sera pas signé comme prévu en marge de la COP 28). 

Dans ce cadre, la Jordanie devait développer un projet de centrale solaire d’une capacité de 600 MW, financé la société émirienne Masdar, et exporter l’électricité produite vers Israël, qui devait fournir en retour à la Jordanie 200 M m3 d’eau désalinisée. L’accord pourrait être relancé à terme compte-tenu du besoin en eau considérable de la Jordanie. 

La guerre à Gaza a déjà des effets sur les intérêts commerciaux français. 

L’ensemble des produits des pays occidentaux fait l’objet d’une campagne de boycott en Jordanie qui est couplée à un ralentissement important de la fréquentation des centres commerciaux, hôtels, cafés et restaurants. Les distributeurs de produits français sont directement affectés ; ils accusent tous une baisse importante de leurs ventes au mois d’octobre, aggravée au mois de novembre (de -30 % à -50/60 %, en glissement annuel). Les filiales d’entreprises françaises sont touchées de manière hétérogène, selon les secteurs et leur lien direct ou non avec les consommateurs.

Source Ambassade de France en Jordanie (Amman)

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