#Climat #Economie #Environnement #LIBAN
Denys Bédarride
jeudi 9 mai 2024 Dernière mise à jour le Jeudi 9 Mai 2024 à 07:00

Le changement climatique aura des effets économiques élevés au Liban. Il devrait impacter des secteurs clés, en particulier l’agriculture (1,4% du PIB) et le tourisme (14% du PIB). Celui-ci sera affecté en hiver par la réduction du nombre de jours de neige, et en été par la multiplication des feux de forêts causés par des sècheresses et la montée des températures. Quant à l’agriculture, les pertes de productivité auront des impacts socio-économiques très élevés, alors que 20% des foyers libanais ont des revenus primaires ou secondaires liés au secteur.

La persistance d’une gouvernance déficiente compromet en outre la capacité du secteur de l’eau – qui affecte directement les secteurs exportateurs et créateurs d’emploi, tels que l’agriculture et le tourisme – à répondre aux impacts du changement climatique. Or au regard de la dépendance du Liban aux flux extérieurs et aux importations alimentaires, toute perturbation sur le tourisme et l’agriculture entrainera des effets économiques prononcés. 

La Banque Mondiale prévoit ainsi une baisse annuelle entre -1,1% et -2% du PIB réel d’ici 2040 causée par le changement climatique. Le déficit budgétaire risque également de se dégrader davantage, face à la nécessité de répondre aux phénomènes météorologiques extrêmes.

Le redressement et l’adaptation de certains secteurs prioritaires sont essentiels pour assurer un « redéveloppement » durable. 

Les secteurs de l’énergie, de la gestion des déchets et de l’eau sont à la croisée d’enjeux économiques, environnementaux et de santé publique. Victimes d’un sous-investissement chronique, ces infrastructures sont aujourd’hui dans un état très dégradé. Le redressement du secteur de l’électricité apparaît particulièrement prioritaire. 

Le Liban est un émetteur de carbone très marginal (0,06% des émissions mondiales) mais pourra difficilement se tenir en marge de la transition écologique, étant une petite économie ouverte au mix énergétique très carboné (95% de pétrole). De plus, la surutilisation des groupes électrogènes est un facteur de dégradation sanitaire (émissions de particules fines) et économique (surcoût pour les entreprises et ménages). 

La transition énergétique permettrait ainsi au Liban de réduire sa facture énergétique, équivalente à environ 25% du PIB, et de soutenir le rééquilibrage de son économie vers un modèle productif.

L’État libanais n’est toutefois pas en mesure, à ce stade, ni de piloter ni de financer sa transition écologique. 

Estimés sur le long terme par la Banque Mondiale à plus de 7,6 Md$ (soit 42% du PIB 2023), les financements requis ne peuvent pas être couverts par les finances nationales : les recettes budgétaires devraient atteindre seulement 17% du PIB en 2024 selon la loi de finances, et le Liban est en situation de défaut souverain sans perspective à court terme de restructuration de sa dette. 

Les bailleurs, agences onusiennes et ONG tentent de combler ce vide, mais de manière souvent locale et fragmentée. Une partie de l’aide a certes été utilisée pour la réalisation de stratégies sectorielles (eau, déchets, environnement…), mais leur mise en œuvre est très partielle compte tenu des déficiences de l’État libanais. 

Les bailleurs financent le plus souvent, en don, des petits projets à portée locale (installation de panneaux solaires, protection et dépollution d’espaces ciblés tels que les forêts ou lacs, surveillance de la biodiversité, gestion des déchets au niveau municipal…). S’ils peuvent se traduire par des retombées directes pour les populations concernées, ces projets risquent d’ancrer la transition écologique dans une logique fragmentée et désordonnée, à un coût non-efficient et financé par les contribuables étrangers. 

Le financement massif ces dernières années de panneaux solaires en don, alors même qu’il s’agit d’investissements très rapidement rentabilisés, en constitue l’exemple le plus marquant.

Source : Ambassade de France au Liban

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