Si certaines entreprises de taille intermédiaire (ETI) parvenaient à se financer partiellement via les banques, et certaines microentreprises via le secteur de la microfinance, les PME souffraient d’un large déficit de financement. Le secteur des startups a fait figure d’exception, ayant bénéficié d’une politique dédiée de la Banque du Liban.
Les contraintes de financement des entreprises ont été fortement exacerbées par la crise. D’abord, le secteur bancaire, qui s’est effondré en 2019, a stoppé toute activité de prêt. La dépréciation brutale de la livre (-98% par rapport au dollar depuis 2019) a toutefois permis au secteur privé de se désendetter très fortement, en remboursant ses prêts au taux de change officiel. Ensuite, les bailleurs spécialisés dans le financement du secteur privé (BERD, BEI, SFI, Proparco, etc.), qui avaient prêté et/ou investi dans des banques libanaises, ont décidé de suspendre leurs activités de financement tant qu’un programme FMI n’aura pas été adopté.
Enfin, la crise de l’électricité a nettement dégradé les capacités d’autofinancement des entreprises, du fait du coût exorbitant des groupes électrogènes (0,5 $/kWh, contre une moyenne mondiale de 0,16 $/kWh), ce qui entraîne un effet d’éviction vis-à-vis de l’investissement productif. Les besoins se situent surtout au niveau des ETI et PME industrielles. Le tissu productif libanais est embryonnaire (ses exportations représentant 7% du PIB avant crise) mais diversifié (agroalimentaire, pharmaceutique, chimie, matériel électrique, papier/bois).
La chute de la livre a globalement amélioré la compétitivité-coût (bien que les coûts énergétiques aient pesé en sens contraire), mais la plupart des PME n’ont pas réussi à accroître leur production ni à la réorienter à l’export. La pénurie de financement contraint en effet les entreprises à privilégier l’autofinancement et empêche de mener des investissements significatifs, de financer le besoin en fonds de roulement et de s’insérer dans le commerce international, dans un contexte de risque pays maximal. L’activité est maintenue à des niveaux très faibles, alors que la petite taille de la majorité des établissements est un frein à leur modernisation et que leurs coûts demeureront élevés sans la réalisation d’économies d’échelle.
Dans ce contexte, et en l’absence de restructuration du secteur bancaire, des réflexions ont été engagées par les bailleurs pour créer les conditions de leur réengagement. Des financements directs pourraient être apportés aux ETI les plus viables, dont les revenus sont en grande majorité effectués à l’export et qui génèrent des dollars « offshore » (à l’instar du prêt de 15 M$ que vient d’accorder la SFI au groupe MAN). Par ailleurs, un fonds de dette dédié au financement d’opérations de solarisation, initié par USAID (qui apporte 4 M$ en don servant de garantie de première perte), vise une première levée de fonds à hauteur de 16 M$. Le financement des PME libanaises (« mésofinance ») demeure toutefois un angle mort de l’action des bailleurs. L’UE prévoit certes de débourser plusieurs dizaines de millions d’euros de don en soutien aux PME, mais ses programmes consistent avant tout en de l’assistance technique, alors que les PME font état de besoins de financement en dette. Les bailleurs doivent encore sécuriser un mécanisme – à l’instar du Fonds européen pour le développement durable (FEDD+) – leur permettant d’opérer malgré le niveau élevé du risque pays.
Source : Ambassade de France au Liban
Réagissez à cet article