La problématique de la reconstruction du Liban suite à la guerre avec Israël vient s’ajouter à celle du redressement d’un pays en crise profonde depuis 2019. Il est à ce titre intéressant de revenir sur les expériences les plus récentes en matière de reconstruction, en 2006 et en 2020, qui n’ont pas permis d’inscrire le Liban sur une trajectoire de développement soutenable en dépit d’un soutien financier international important.
La reconstruction suite à la guerre de l’été 2006 avait bénéficié d’un soutien extérieur substantiel.
Le niveau des dommages avait été estimé à 3,2 Md$ (15% du PIB), concentré avant tout dans les infrastructures (ponts, routes, aéroport, réseaux, usines) ainsi que dans l’immobilier. Les pays du Golfe avaient effectué un dépôt d’1,5 Md$ à la Banque du Liban et fourni des dons dépassant 1 Md$ pour financer des dédommagements et des travaux de reconstruction.
L’Iran et le Hezbollah avaient quant à eux assuré une partie de l’effort de reconstruction des bâtiments, notamment dans la banlieue sud de Beyrouth. La conférence de Paris III de janvier 2007 avait permis de réunir des engagements de 7,5 Md$ (dont 500 M€ de la France), mais dont la moitié seulement aurait été décaissée, dans un contexte de mise en œuvre limitée des conditionnalités agréées en matière de réformes.
L’explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020 a suscité un nouvel effort financier international.
Après la conférence CEDRE de 2018, qui avait permis de mobiliser 11 Md$ d’aide-projet in fine non-décaissée en l’absence de respect des conditionnalités, les bailleurs ont décidé d’apporter un soutien direct à la population, afin d’inciter l’État libanais à adopter un programme FMI (sans succès). La reconstruction des quartiers sinistrés a ainsi été conduite via des fonds multiples.
Dans le reste du pays, l’aide internationale, estimée à environ 1,5 Md$/an, a été destinée à 90% aux populations vulnérables à travers l’aide humanitaire et le financement de filets sociaux, d’écoles et d’hôpitaux.
Dans le même temps, les grandes infrastructures publiques n’ont été ni reconstruites dans les zones sinistrées (zone non-conteneurisée du port de Beyrouth, centre de commande d’Électricité du Liban), ni réhabilitées dans le reste du pays (aéroport, routes, réseaux d’électricité, d’eau et de télécommunications).
Les financements disponibles pour la reconstruction suite à la guerre de 2024 demeurent incertains.
Les destructions sont plus importantes qu’en 2006, mais elles se concentrent dans l’immobilier et concernent moins les infrastructures publiques. La Banque mondiale estime que la guerre a causé à fin octobre 2024 des dommages physiques de 3,4 Md$.
Ces estimations seront revues à la hausse dans une prochaine étude, dans la mesure où la guerre s’est poursuivie à haute intensité pendant un mois. Selon de premières estimations, le coût du déblaiement et de la reconstruction pourrait dépasser 7 Md$ (soit 30% du PIB). Les capacités budgétaires de l’Etat libanais sont toutefois très contraintes ; seule une enveloppe de 26 M$ ayant été prévue à ce stade.
Le niveau de financement qui sera apporté par la diaspora est hautement incertain, tout comme la capacité du Hezbollah et de l’Iran à mobiliser et acheminer des fonds suite à la guerre et à la chute du régime Assad. Les bailleurs occidentaux et golfiques n’ont quant à eux pas annoncé à ce stade de financements supplémentaires destinés à la reconstruction, dans l’attente du nouveau gouvernement et de la mise en œuvre des réformes.
Des opportunités pourraient se matérialiser sur les enjeux d’économie circulaire liés à la reconstruction.
Le volume important de destructions et les contraintes financières plaident en effet en faveur d’une approche circulaire de recyclage des débris pour la reconstruction.
À moyen terme, en cas de redressement global du pays, des opportunités économiques plus significatives émergeront alors compte tenu du besoin de redéveloppement des grandes infrastructures de transports, d’électricité, d’eau et de télécommunications.
Source Ambassade de France au Liban
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