« La stabilité du Maghreb, un impératif pour l’Europe ». Analyse de Hakim El Karoui
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Fiona Urbain
mercredi 28 juillet 2021 Dernière mise à jour le Mercredi 28 Juillet 2021 à 18:27

Dans une publication, Hakim El Karoui, senior fellow de l’Institut Montaigne et auteur de plusieurs rapports, dont Nouveau monde arabe, nouvelle "politique arabe" pour la France plaide pour que les Européens octroient un soutien massif au Maghreb, notamment à la Tunisie, sans contrepartie trop brutale, pour éviter un choc social et politique qui y menacerait le fragile édifice démocratique.

Relancer le partenariat euro-méditerranéen 

Le bilan est clair : les pays du Maghreb, et particulièrement la Tunisie, ont besoin d’être soutenus financièrement dans le contexte de la crise sanitaire. Les économies de la région et la stabilité de ces pays sont sous tension. 

L’Europe doit pouvoir inclure le Maghreb dans son plan européen de 750 milliards d’euros. 

Faire bénéficier la capacité d’emprunt européenne aux trois pays du Maghreb leur permettrait d’acquérir les liquidités nécessaires à la transformation de leurs modèles de développement. À cette condition, la crise pourra constituer une opportunité à saisir pour se relancer durablement. 

Le Maghreb, nouvel enjeu stratégique 

Le Maghreb n’est plus un pré-carré européen. Les trois pays du Maghreb font l’objet d’un intérêt de la part des grands acteurs régionaux et mondiaux. L’influence de l’Europe – et particulièrement celle de la France – recule progressivement.
 
Seule démocratie du monde arabe, proche de l’Europe par ses échanges commerciaux, la Tunisie représente un fort symbole politique. La France demeure un partenaire majeur de la Tunisie : environ 14 % des importations tunisiennes en 2019 (contre 21 % en 2009).

Mais l’analyse des flux d’investissements directs montre que d’autres puissances s’intéressent à la Tunisie. 39 % du stock d’IDE en 2019 provenaient des pays du Golfe, dont 11 % pour le Qatar. La Turquie est également très implantée sur le marché tunisien, notamment dans le domaine des travaux publics et des infrastructures. 
 
Le Maroc, passerelle entre l’Europe et l’Afrique, plateforme commerciale et financière importante, économie ouverte aux échanges et insérée dans les principaux flux économiques et financiers, est au cœur des intérêts régionaux et internationaux. 

Le Maroc intéresse de plus en plus la Chine, dont la diaspora est assez importante sur le littoral marocain. La Chine regarde de près les implantations logistiques, notamment à Tanger, et exporte beaucoup de biens manufacturés et de matériel au Maroc. 

Elle a aussi construit un partenariat avec le Royaume pendant la crise du Covid-19 : envois de masques, test avancé de vaccins, distribution massive de vaccins chinois, etc. La Chine est en bonne position sur le plan des importations marocaines : elle représente 10 % du total en 2019, même si elle demeure derrière l’Espagne (15 %) et la France (12 %). 
 
Fondamentalement souverainiste mais très ouverte sur l’international par ses échanges commerciaux, l’Algérie se caractérise par son paradoxe. Riche en hydrocarbures et très attentive aux choix de ses partenaires économiques, l’Algérie détient les clients et les fournisseurs les plus diversifiés de la région. 

La Russie et la Chine sont devenues des partenaires importants de l’Algérie (17 % des importations algériennes provenaient de Chine en 2019). Longtemps concentrées sur le secteur de la défense, les relations entre Moscou et Alger ont récemment évolué avec la crise du Covid-19 vers le domaine de la santé (utilisation du vaccin russe en Algérie).

C’est pourquoi l’Europe doit rester très attentive à la situation du Maghreb et trouver des solutions, pas seulement d’ordre financier, pour contribuer à la stabilité de ces pays. Celles-ci dépendent du bien-être des populations, davantage que le seul soutien aux régimes. Agissons tant qu’il est encore temps. 

Source : Institut Montaigne

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