Les indicateurs macroéconomiques montrent que le Liban connait une crise d’une extrême gravité. Le PIB a été ramené de 52 Mds$ en 2019 à 22 Mds$ en 2021. Le taux de chômage aurait progressé de 11% en 2018 à 30% en 2021.
Le déficit courant reste élevé à -12,8% du PIB en 2022 et le taux de change de marché s’est exponentiellement dégradé (40 000 LBP pour 1 $ en novembre 2022 contre 1507,5 avant crise).
Cette situation macroéconomique devrait théoriquement se traduire par un arrêt total de l’activité au Liban et une contraction très forte de la consommation, d’autant que les services publics ne fonctionnent que partiellement et de manière très dégradée.
Pourtant, une approche plus microéconomique semble montrer que l’activité se poursuit. Le Purchasing Managers’Index PMI s’est établi à 49,9 en juillet 2022, soit son niveau le plus élevé depuis juin 2013.
L’activité du port de Beyrouth a progressé de +6,4% sur les sept premiers mois de 2022 et le trafic de l’aéroport de Beyrouth de +55% en glissement annuel sur les neuf premiers mois de 2022.
Les importations sur les sept premiers mois de l’année s’élèvent à 11 Mds$, sur une telle base, le montant pour 2022 pourrait atteindre 19 Mds, soit un niveau équivalent à la période d’avant crise.
Les pistes d’explication sont à ce stade des hypothèses qui pourraient illustrer le phénomène d’adaptation de l’économie libanaise :
– le maintien des transferts en devise soit 19,8% du PIB en 2020, qui entretient la consommation.
– des pics saisonniers d’activités de services dans les secteurs protégés comme le tourisme, l’hôtellerie et la restauration
– le développement du secteur informel
– les réserves et comportement de thésaurisation des agents économiques
Par ailleurs, l’arrêt du fonctionnement système bancaire et la perte de crédibilité de la livre libanaise auraient dû paralyser l’économie libanaise. La continuité du système de paiements et d’approvisionnements du marché en liquidité a été permise par un double effet de développement d’une économie en cash et une dollarisation progressive des principaux secteurs d’activité.
Aujourd’hui la quantité de dollars en circulation se situerait dans une fourchette entre 10 et 15 Mds$ soit entre 50% et 75% du PIB libanais, ce qui représente une dollarisation partielle de facto.
En l’absence de programme FMI, cette situation pourrait devenir structurelle mais elle place l’économie libanaise dans un équilibre précaire et sous-optimal :
– L’Etat et les services publics continueraient de s’affaiblir
– La dépendance vis-à-vis de l’extérieur et les mécanismes de solidarité de la diaspora reposent sur une émigration de la population active la plus qualifiée
– L’investissement productif est découragé et l’investissement publicain infrastructures est réduit à néant
In fine, le Liban s’oriente vers un modèle économique de consommation de biens courants, en situation de sous-investissement et donc la dépense est permise principalement par des canaux d’approvisionnements externes ou non officiels en liquidité.
Source : Service économique Ambassade de France au Liban
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