Le Président Kais Saied reste constant dans son rejet du programme de réformes tel qu’il avait été négocié par son gouvernement avec le FMI, avec des sorties publiques régulières contre les « diktats » du FMI, comme « Aucune sourate dans le Coran ne s’appelle FMI ».
Le Président a réitéré cette position lors de sa venue à Paris au Sommet pour un Nouveau Pacte Financier les 22 et 23 juin dernier. Il est désormais acté que le programme de réformes qui avait fait l’objet d’un accord technique avec les services du FMI (Staff Level agreement) en octobre 2022 est caduc dans la mesure où le Président a exprimé sa ferme opposition à toute réforme du système des subventions aux carburants, en limogeant début mai la ministre de l’énergie et de l’industrie qui s’était s’exprimée sur cette question.
La conjoncture actuelle plus favorable favorise le statu quo et n’incite pas la Tunisie à s’engager dans la voie de réformes économiques structurelles. La Tunisie connait depuis le début de l’année un relatif desserrement des contraintes budgétaires et extérieures. La croissance au 1er trimestre (2,1% en glissement annuel) a été tirée par l’industrie manufacturière exportatrice, ainsi que les secteurs des transports et de l’hôtellerie-restauration grâce à la reprise du tourisme.
La progression des recettes fiscales de 14% au 1er trimestre dépasse les attentes (même si elle doit être relativisée dans le contexte inflationiste actuel) et la baisse des cours du pétrole brut et des céréales allège les charges de compensation.
De même, la relative stabilité du dinar, la bonne orientation des recettes du tourisme et des transferts des non-résidents et la résorption du déficit commercial (d’environ 600 M$ sur les 5 premiers mois en glissement annuel), alors que les principales échéances de dette extérieure ne sont attendues qu’à l’automne, allègent les tensions sur les paiements extérieurs, et ce d’autant plus que l’encaissement d’un prêt de 500 M$ de l’Afreximbank vient de faire remonter les réserves de 92 à 99 jours d’importation.
Pour autant, la dégradation par Fitch Rating de la notation souveraine de CCC+ à CCC- le 9 juin dernier, qui sanctionne avant tout les blocages politiques autour d’un programme de réformes, et les conditions non concessionnelles du prêt de l’Afreximbank, « coût de l’absence de programme FMI », témoignent des dangers à terme d’un tel ‘statut quo’. Première ombre au tableau : les perspectives d’une très mauvaise récolte céréalière, en raison de la sécheresse en Tunisie, se traduira par un surcroit d’importations au 2e semestre.
En dépit d’un affichage de ferme rejet, le président a cependant envoyé récemment le signal d’une préoccupation accrue pour les questions économiques en conviant une quinzaine d’économistes au palais de Carthage et a évoqué publiquement l’idée d’une taxation supplémentaire sur les plus riches comme possible alternative à la levée des subventions.
Source Ambassade de France en Tunisie
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