Lebanon : How for two years, the multidimensional crisis in which Lebanon has been plunged has continued to modify its economic, financial and monetary landscape
#Agriculture #Crise #Economie #Tourisme #LIBAN
Denys Bédarride
mercredi 31 janvier 2024 Dernière mise à jour le Mercredi 31 Janvier 2024 à 07:00

L’économie libanaise s’est construite sur un modèle rentier insoutenable. Dans les années 1950-60, le Liban jouait un rôle de hub moyen-oriental financier (banques), énergétique (raffineries de pétrole) et de transport (port et aéroport de Beyrouth). Ce modèle s’est essoufflé avec le développement des pays du Golfe et la guerre civile libanaise.

À partir des années 1990, l’élite politico-financière a cherché à recréer ce modèle, mais l’a in fine recentré sur son volet bancaire et sur l’attraction de capitaux étrangers destinés à la reconstruction (principalement immobilière) et non à de l’investissement productif. De plus, la doctrine d’un taux de change LBP/USD fixe et la hausse consécutive des taux d’intérêts ont créé une situation défavorable à l’investissement productif : le Liban a ainsi souffert de la maladie hollandaise, sans pour autant disposer de ressources primaires.

L’avènement de la crise en 2019 n’a pas mené à une remise en cause profonde de ce modèle rentier, qui s’est replié sur sa dépendance à la diaspora via les transferts de fonds (6-7 Md$, 30% du PIB) et les recettes touristiques liées aux retours saisonniers (4-5 Md$, 20% du PIB). 

La majorité des élites du pays reste persuadée que ce système – objectivement très dégradé et vulnérable – pourra tenir jusqu’à l’apparition de nouvelles rentes, qui n’apparaissent pourtant ni soutenables ni réalistes : 

  1. le secteur touristique est très vulnérable à des paramètres extérieurs, comme la crise actuelle vient de le rappeler ; 
  2. même en cas de découverte majeure de gaz, les recettes budgétaires seraient limitées et ne se matérialiseraient qu’à moyen terme ; 
  3. la reconstruction de la Syrie aurait un impact limité sur l’économie libanaise, dans un contexte de forte concurrence régionale aux plans industriel et portuaire.

Le Liban possède pourtant des atouts pour évoluer vers une économie productive et soutenable. 

Le capital humain peut devenir l’un des moteurs de l’économie, en particulier via la relance de l’écosystème tech et des services aux entreprises. La destination Liban présente ainsi des opportunités d’outsourcing compte tenu d’une main d’œuvre trilingue, qualifiée et compétitive. Cette tendance se matérialise dans la relation bilatérale, puisque 25% des employés libanais (sur 6300 au total) des entreprises françaises implantées au Liban sont dédiés à des activités de backoffice ou contribuent depuis le Liban à des opérations visant des marchés tiers. 

Par ailleurs, la diversité agro-climatique et les ressources en eau du Liban pourraient contribuer à la montée en puissance du secteur agricole et de la filière agroalimentaire. Enfin, le développement de l’industrie légère locale, aujourd’hui embryonnaire mais diversifiée, permettrait de rééquilibrer le commerce extérieur via une substitution partielle des importations et une hausse des exportations. 

Historiquement désavantagée par les taux d’intérêts élevés et un taux de change réel surévalué, l’industrie libanaise n’est pas parvenue à réorienter sa production à l’export dans le contexte de la crise (les exportations étant passées de 3,7 Md$ en 2019 à 3,5 Md$ en 2022).

L’émergence de cette nouvelle économie vertueuse nécessite de nombreux prérequis : 

  1. la préservation du capital humain, premier avantage comparatif du Liban et priorité absolue dans un contexte de déliquescence du système éducatif et universitaire ; 
  2. la stabilisation du cadre macroéconomique et la restructuration du secteur bancaire, alors que l’absence d’accès au crédit constitue l’un des principaux freins au développement des entreprises ; 
  3. la préservation des fonctions étatiques de mise en place de normes, notamment pour favoriser les exportations et générer des économies d’échelle ; 
  4. le redressement des infrastructures, en particulier énergétiques, en mobilisant les partenariats public-privé (PPP).

Source Ambassade de France au Liban, Service économique

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