Brouillon auto 41
#Diplomatie #Economie #EtatsUnis #JoeBiden #Politique #LIBYE
Denys Bédarride
vendredi 16 avril 2021 Dernière mise à jour le Vendredi 16 Avril 2021 à 07:46

L'Administration américaine du nouveau président, Joe Biden, s'emploie à élaborer une nouvelle stratégie en Libye, différente de celle adoptée par le l'ancien locataire de la Maison Blanche, Donald Trump. Ce dernier avait affiché un discours mystérieux et équivoque, face aux ambitions du général libyen à la retraite, Khalifa Haftar, qui aspirait à gouverner le pays.

Contrairement à Trump (2017-2021), l’Administration Biden ne semble pas accepter les exactions commises par les milices de Haftar, selon un rapport émis par le Département d’Etat sur les droits de l’Homme, au titre de l’année 2020, un document qui a été rendu public le 13 avril dernier.
En effet, le Rapport accuse les milices de Haftar d’être impliquées dans des opérations d’exécution arbitraires et illégales, de disparitions forcées, d’actes de torture et d’enrôlement d’enfants, utilisés dans le conflit armé. 


Ledit rapport souligne, également, que des groupes alliés de Haftar s’étaient emparés de la ville de Syrte (centre), où de nombreux civils ont été victimes de kidnappings et de séquestrations, au motif de leur « loyauté » affichée au gouvernement d’Entente nationale de Tripoli. Le même document ne passe pas sous silence les crimes et exactions, œuvre des milices d’al-Kany dans la ville de Tarhouna (ouest).


Ce rapport constitue un indice quant à la politique qu’adoptera Washington à l’endroit des milices de Haftar, en particulier, au vu de la multiplication des assassinats et des actes d’enlèvement dans la ville de Benghazi (est), où la situation sécuritaire risque de devenir hors de contrôle.
Le Secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a tenu, lors de la présentation du rapport, à utiliser l’expression « l’ensemble des outils de notre diplomatie pour défendre les droits de l’homme et exiger la reddition des comptes par les auteurs des exactions ».


Les sanctions : Eventuelle option de Washington ? 


Le Conseiller à la Sécurité nationale américaine, Jake Sullivan, avait publié, le 12 mars écoulé, un communiqué dans lequel il a souligné « la nécessité de renforcer la reddition des comptes par toute partie qui s’emploie à saper la feuille de route électorale, mise en place par les Libyens ». 
Il s’agit d’un message adressé, essentiellement, à Haftar, qui avait saboté nombre de tentatives antérieures pour le déroulement d’élections, dont celles qui étaient prévues pour le 10 décembre 2018, en vertu de l’Accord de Paris, ainsi que des élections au printemps 2019, objet d’un accord entre les protagonistes du conflit à Palerme, en Italie. 

D’ailleurs, Haftar a choisi la date du printemps 2019 pour lancer son offensive militaire d’envergure contre Tripoli, au lieu d’organiser les élections, profitant à l’époque du célèbre entretien téléphonique qu’il a eu avec l’Administration Trump, entretien considéré comme étant un « feu orange » qui lui a été accordé pour continuer les combats, lesquels combats se sont poursuivis, 14 mois durant, avec leur lots de milliers de morts et de blessés ainsi que de dégâts matériels considérables. 

La date du 24 décembre 2021 représente un nouveau rendez-vous pour la tenue d’élections présidentielle et législatives, objet d’un accord entre les protagonistes du conflit, au cours de leur réunion tenue en Tunisie, au mois de novembre dernier.

Les Etats-Unis et les Nations Unies parient sur l’organisation d’élections libyennes crédibles et la garantie aux citoyens de services de base, pour mettre fin au conflit par le biais d’un processus politique inclusif, selon Blinken, qui a effectué un entretien téléphonique avec Abdelhamid Debaibah, Chef du gouvernement d’Union libyen.


Les mercenaires de Wagner : Principale source d’inquiétude de Washington


Les quelque 2000 mercenaires de Wagner déployés en Libye représentent la principale source d’inquiétude pour les Etats-Unis d’autant plus que des informations circulent sur les efforts fournis par Moscou pour assurer une présence militaire permanente dans le pays de l’Afrique du Nord, ce qui représente une grande menace aux intérêts de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique nord) au sud de la Méditerranée.


Les mercenaires de Wagner continuent à creuser des tranchées et à fortifier leurs positions, selon des informations rapportées par les forces de l’Opération « Volcan de la colère », relevant de l’armée libyenne, ce qui pourrait indiquer que le retrait des mercenaires du territoire libyen ne se fera pas à une date proche. 
Cette configuration a incité Washington à activer le rôle de ses alliés européens, pour les amener à placer Libye en tête de leurs priorités, l’objectif étant de contrer toute expansion russe dans la région.


C’est dans ce cadre que s’inscrit la participation de Blinken à la réunion des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN, le 23 mars écoulé à Bruxelles, pour discuter d’une série de dossiers, principalement, du défi que représente la présence russe en Libye. 
Au surlendemain de cette réunion transatlantique, les chefs de la diplomatie de trois principaux pays européens, en l’occurrence la France, l’Allemagne et l’Italie, se sont rendus à Tripoli, pour affirmer que la position européenne concernant la situation en Libye est unie, et pour souligner leur soutien au gouvernement d’Union nationale, récemment investi. 
Cette position euro-américaine, appuyant le gouvernement d’Union, est venue corroborer l’érosion de la confiance de la Communauté internationale en Haftar, considéré comme principal responsable de l’avènement des mercenaires russes en Libye.


Des options diplomatiques et économiques 


Plusieurs cercles américains, fins observateurs du dossier libyen, excluent le recours de Washington à la force pour faire sortir du territoire libyen les mercenaires de Wagner.
En effet, l’intervention américaine en Libye, en 2011, s’est soldée, plusieurs années plus tard, par le renforcement de la présence des mercenaires russes dans deux bases aériennes, à Syrte et à al-Joffra (centre), dernière conséquence que pouvait imaginer et envisager le décideur américain, il y a de cela une décennie. 
Ainsi, il est prévu que Washington réactive ses outils diplomatiques et économiques pour exercer une pression sur la Russie, afin que cette dernière rapatrie ses mercenaires de Libye.


Cette pression pourrait également toucher les alliés des Américains dans la région, qui ont facilité la présence de Wagner dans l’aile sud de l’OTAN. 
En effet, le gel par l’Administration Biden de la vente des avions de type F-35 aux Emirats peut être considéré comme faisant partie de la pression américaine exercée par Washington sur Abou Dhabi pour l’amener à suspendre voire arrêter sa coordination militaire avec la Russie en Libye.


Néanmoins, Biden pourrait faire face à une scission dans l’approche des partis démocrate et républicain au Congrès au sujet de la solution envisageable en Libye.
Si la Chambre des représentants avait approuvé la loi de renforcement de la stabilité en Libye, en novembre dernier, le texte est toujours en suspens au niveau du Sénat, à majorité républicaine.
Il n’en demeure pas moins que cette division n’a pas empêché Washington d’inscrire les milices d’al-Canyettes, alliées des milices de Haftar sur la liste des sanctions, au cours du même mois.


« La loi sur le renforcement de la stabilité en Libye » prévoit l’élaboration de listes de personnalités qui ont violé le droit international et les droits de l’homme en Libye, tout en infligeant des sanctions aux auteurs de crimes de guerre ou de crimes financiers.
Au cours des trois premiers mois du mandat de Biden, Washington a montré davantage d’implication dans le dossier libyen, pour reprendre l’initiative des parties internationales, au premier rang desquelles figure la Russie. 


Les Etats-Unis se sont employés, également, à activer le rôle de leurs alliés européens, pour intervenir avec force dans le dossier libyen, mais font face à une scission interne au Congrès, ce qui a entravé l’adoption de la loi pour le renforcement de la stabilité en Libye 


Washington a pesé de tout son poids pour l’organisation des élections libyennes, à la date prévue, (décembre prochain), tout en oeuvrant à marginaliser le rôle de Haftar, sans pour autant l’exclure totalement, compte tenu de sa capacité à saper le processus de paix dans le pays.

Source Agence Anadolu 

Réagissez à cet article

Vos commentaires

Rejoignez la discussion

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *