La conjoncture économique libanaise se dégrade depuis plusieurs semaines de manière accélérée. Elle laisse craindre une aggravation des paramètres macroéconomiques et une détérioration des conditions de vie élémentaires, qui pourraient provoquer à court terme une augmentation des tensions sociales voire sécuritaires.
L’effondrement exponentiel de la livre libanaise accroit les tensions sur le marché des changes parallèle et sur les liquidités en devises. Le taux de change informel a atteint 140 000 LBP/ 1 USD le 21 mars 2023 (avant de revenir osciller entre 100 000 et 110 000), alors qu’il s’élevait à 100 000 LBP / 1 USD la semaine précédente. Cette tendance de dépréciation résulte de l’augmentation importante de la base monétaire au cours des derniers mois, de la perte de confiance généralisée dans la monnaie libanaise et de la perte d’efficacité des instruments de politique monétaire pour réguler l’inflation et le change. De nombreux prix (restaurants, supermarchés) sont désormais libellés en dollars.
Les administrations publiques, dont les recettes sont libellées en livres et les salaires payés en livres, ne peuvent plus suivre le rythme de dépréciation et voient le pouvoir d’achat des fonctionnaires s’effondrer. Les services publics fondamentaux, tels que la santé et l’éducation, risquent d’être interrompus par des mouvements de grève. L’électricité publique reste extrêmement limitée (4-5h par jour) compte-tenu de l’absence de transferts budgétaires de l’État à Électricité du Liban (EDL) et au rationnement des devises par la Banque du Liban.
Les derniers services publics relativement fonctionnels entrent dans une phase critique. Les stations d’eau et d’assainissement, alimentées de manière instable et insuffisante en électricité, fonctionnent de façon très dégradée, ce qui implique des risques environnementaux, sanitaires et sociaux. Une coupure d’internet et de téléphonie n’est pas à exclure à très court terme car l’entreprise publique Ogero, unique fournisseur de bande passante, manque de liquidités pour acheter du fuel pour ses groupes électrogènes et répondre aux exigences salariales de ses employés.
L’effondrement de la valeur de la livre se traduit aussi par une augmentation rapide et continue des biens de première nécessité. Les tarifs de l’électricité, majorés en début d’année, figurent parmi les plus élevés au monde. Les prix de l’essence, du diesel et du gaz domestique, libellés en livres, sont désormais revalorisés deux fois par jour par le ministère de l’Energie et indexés quasi-automatiquement sur le prix du baril de pétrole et le taux de change parallèle.
Ils augmentent ainsi continuellement, ayant été multipliés par 80 depuis janvier 2021 (effet de la levée totale des subventions) et par 3,5 depuis septembre 2022 (effet de la dépréciation de la livre). Si l’augmentation des prix de produits alimentaires a encouragé la croissance du secteur agroalimentaire libanais, le Liban importe toujours environ 70 % de ses besoins (contre 86% avant 2019).
Le prix des produits locaux est du reste dépendant du cout du transport et de l’importation de matières premières. Par ailleurs, le prix du pain, élément de base de l’alimentation au Liban, est soumis à un barème émis par le ministère de l’Economie, qui revoit de plus en plus fréquemment ce barème à la hausse. Enfin, la fixation quotidienne en livres des prix des médicaments constitue également un facteur de tensions récurrentes
Source : Ambassade de France au Liban
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