Soutenu par la SFI, ce processus a pour objectifs déclarés de réduire les risques systémiques que peuvent poser les banques commerciales et de renforcer leur résilience face aux chocs économiques futurs.
Les autorités monétaires marocaines ont annoncé, le 28 novembre 2024, qu’elles travaillent sur un projet de loi visant à libérer l’équivalent de 9,7 milliards $ de créances en souffrance dans les bilans des banques commerciales, en les rendant cessibles et négociables sur un marché secondaire. Il s’agit, en d’autres termes, de créer un cadre juridique pour organiser la titrisation des créances bancaires en difficulté. A cet effet, Bank Al-Maghrib, la Banque centrale du Royaume, a réuni des parties prenantes ce jeudi pour discuter des avancées du projet de loi.
« C’est une opportunité pour partager avec vous les objectifs et les contours de la réforme, d’apprécier ensemble les progrès réalisés et d’examiner les perspectives qui permettront l’émergence d’un marché efficient et transparent où les établissements de crédit pourraient céder leurs créances en souffrance de manière sécurisée », a déclaré Abderrahim Bouazza, directeur général de l’institution. Selon les initiateurs de ce projet de loi, l’objectif est double : permettre aux banques commerciales marocaines de sortir d’une situation résultant d’une succession de chocs mondiaux ayant compliqué la capacité des débiteurs à honorer leurs engagements de remboursement, et retirer ces créances des bilans des banques commerciales, libérant ainsi les sommes mises de côté pour les provisionner.
Dans un tel scénario, ces institutions financières seraient mieux préparées à faire face à d’éventuels chocs futurs. Plus globalement, il s’agit de réduire un risque pouvant devenir systémique. La Banque centrale marocaine indique que le total de ces créances en souffrance représente jusqu’à 7% du produit intérieur brut (PIB) du pays, voire plus si l’on tient compte des provisions. Le processus bénéficie du soutien de la Société financière internationale (SFI), la branche de la Banque mondiale qui accompagne le secteur privé et financier dans les pays en développement. Cependant, sa mise en œuvre ne sera pas aisée. « Pour la cession de leurs créances en souffrance, les banques doivent disposer au préalable de systèmes d’information permettant de fournir aux investisseurs des informations détaillées sur ces créances afin de leur permettre de mener leurs due diligence et de disposer d’une base fiable pour leur valorisation », a rappelé le directeur général de la Banque centrale.
En effet, le simple transfert de ces créances hors des bilans bancaires ne rendra pas les débiteurs plus diligents dans leurs remboursements. De plus, ce nouveau dispositif nécessite un traitement fiscal adapté. Il faudra également trouver des investisseurs capables d’acheter les premiers titres de créances qui seront émis. La Banque centrale évoque l’intervention d’investisseurs spécialisés. Cependant, la question du recouvrement reste posée. La titrisation des créances bancaires a été, dans un passé récent, un levier important de la croissance du secteur bancaire dans des pays comme les Etats-Unis. Il est intéressant de savoir si le projet de loi régulera suffisamment pour éviter les risques de spéculation. Si les banques savent que leurs créances en souffrance peuvent être recyclées sur un marché secondaire crédible, elles pourraient être moins enclines à examiner les risques liés à l’octroi de crédits. Aux Etats-Unis, cela s’est soldé en 2008 par une crise financière internationale, dont les effets se font encore ressentir, et le recours à des interventions de l’Etat qui ont fait exploser le bilan de la Banque centrale (FED).
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